Vétérinaire assistante en chirurgie

AUTEURS
Dr Vet. Marie ROUSSEAU – Ancienne assistante en chirurgie
Dr Vet. Mathieu TARONI – Dip.ECSV- spécialiste en chirurgie

Vétérinaire chirurgie

Anamnèse et commémoratifs

Jack est un chat femelle présentée pour l’investigation d’une masse à l’épaule gauche évoluant depuis un mois, avec une croissance plus rapide depuis deux semaines. La masse n’est pas douloureuse à la palpation mais entraîne une boiterie du même membre depuis trois semaines. Elle reçoit comme traitement du méloxicam depuis une semaine, ce qui n’a pas permis d’amélioration.

Jack n’a pas d’antécédent connu.

Examen clinique

L’examen clinique général ne révèle pas d’anomalie.
Une masse est présente au niveau de la scapula gauche d’environ 4 cm de diamètre, dure et adhérente au plan profond, indolore à la palpation.

Examens complémentaires

Un bilan sanguin, numération formule et bilan biochimique dix paramètres, ne révèle pas d’anomalie significative.
Un examen tomodensitométrique est alors réalisé, afin d’évaluer la faisabilité d’une exérèse chirurgicale et de réaliser un bilan d’extension :

Le scanner conclut à une masse fortement minéralisée impliquant l’épine scapulaire gauche évoquant en premier lieu un processus néoplasique osseux primaire, bénin (ostéome, ostéochondrome) ou malin (ostéosarcome, chondrosarcome), avec une absence d’évidence de dissémination métastatique lymphatique locorégionale, thoracique ou abdominale. 

Intervention chirurgicale 

Au vu de la localisation de la masse et de sa conformation (pédiculée sur l’épine scapulaire), une scapulectomie partielle est envisagée afin de garder le membre. 

Lors de l’intervention chirurgicale, il apparaît que la masse est bien délimitée et non adhérente aux tissus adjacents. Elle est réséquée à la scie oscillante puis l’épine scapulaire, mieux exposée après retrait de la masse, est retirée à sa base à la scie oscillante également. 

Evolution post-opératoire 

Dès le lendemain de la chirurgie, Jack présente un bon état général et prend appui sur le membre opéré. L’analyse histologique conclut à un chondrosarcome, avec une exérèse en marges saines.  

Chondrosarcome 

Le chondrosarcome est une tumeur maligne, dont les cellules néoplasiques produisent une matrice tissulaire cartilagineuse. Elle est classée à la fois dans les tumeurs osseuses et dans les tumeurs des tissus mous, selon sa localisation : elle peut provenir des fosses nasales, des côtes, des os longs, du bassin, des sites extra-squelettiques (comme la glande mammaire, les valves cardiaques, l’aorte, le larynx, la trachée, le poumon et l’épiploon), des vertèbres, des os du visage, des doigts et de l’os pénien (pour les chiens).  

Chez le chat, elle fait partie des deux tumeurs osseuses les plus courantes avec les ostéosarcomes. Bien que des chondrosarcomes aient été décrits dans les os longs et les os plats, les données publiées sont insuffisantes pour déterminer la prédilection du site chez les chats. Dans une étude sur 67 chats, la plupart des chondrosarcomes (46 sur 67) étaient associés aux os ; 63 % impliquaient des os longs et 37 % des os plats. Ces résultats contrastent encore fortement avec la prédilection du site chez le chien, chez lequel 61% des chondrosarcomes surviennent dans les os plats. Parmi les chondrosarcomes d’os longs chez les chats, le fémur et les doigts étaient les sites les plus courants (13 % chacun), suivis du tibia (8,7 %). La scapula était le plus fréquemment touché parmi les os plats ainsi que tous les os (15 %). 

Le chondrosarcome félin présente une agressivité locale importante avec un potentiel métastatique faible. Une exérèse chirurgicale large a de grandes chances d’être curative. Aucun agent de chimiothérapie n’a démontré d’efficacité, et peu de données sont disponibles sur un traitement de radiothérapie. 

Plusieurs cas de scapulectomie totale pour des chondrosarcomes ont été décrits dans la littérature scientifique, avec un bon pronostic fonctionnel. Des cas de scapulectomie partielle ont également été décrits, mais avec une récidive locale de la tumeur dans 40% des cas. Dans le cas de Jack, la localisation particulière de la tumeur a permis une exérèse complète avec une absence de récidive locale et à distance à un an post-opératoire, et une excellente récupération fonctionnelle.